© Édition Revue Noire

 
LE COLOMBIER AURA DEUX ANS !

Nous ne revendiquons pas les spectacles comme « produits », mais comme la proposition d'un trajet spectaculaire des idées.
Avec les équipes et les armes nouvelles du théâtre, nous voulons soutenir les spectacles vivants qui peuvent encore contribuer à nous éloigner des formes monolithiques que certains médias nous imposent. Établir des espaces de tentative pour l'écriture, et des liens éthiques entre artistes et spectateurs. S'ouvrir au divertissement, aux préoccupations sociales, tout en construisant l'authenticité de notre langage artistique.
L’écriture théâtrale est un acte complexe, une expérience proposée à l’acteur et au public. Un acte d'actualité souvent dangereux, au moment où il est risqué pour la première fois par les comédiens.
Mais c'est cet ensemble de risques et de tentatives sur des textes nouveaux, qui peuvent permettre au public, s'il s'en empare, de véritables espaces de critiques sur I’actualité, des surprises, et des lignes de fuite face au conformisme ambiant.
Comment fait-on pour changer le regard sur cette société. L'art et son prototype institutionnel ?
Nous préférons certaines forces créatives de la société, qui s'ajoutent, et auxquelles nous pouvons tous participer. Choisir son théâtre, c'est forcément le créer. Comme acteur ou comme spectateur actif. Savoir échapper aux produits culturels formatés, et rendre à l’art ses états de crise.
Malgré "l'exception culturelle" encore réelle en France, le monde d'aujourd'hui risque d'établir à son insu dans le cinéma et le théâtre une condition économique à ne réaliser que des projets dictés par la rentabilité ou le vedettariat. Et si aujourd'hui le théâtre ne risque pas de nouveaux textes, si le public ne découvre pas de nouvelles pièces, demain il n'y aura pas de nouveaux auteurs pour balayer nos convictions.
II s'agit pour l'instant de permettre concrètement la réalisation de spectacle à risques. Même si certains textes modernes semblent difficiles d'accès, nous préférons avec les spectateurs construire notre propre démarche critique. Ne pas formater (une fois de plus) l'accès au théâtre, ou consommer le spectacle comme un voyage organisé, mais risquer avec le public textes inédits, et formes particulières...
Nous pensons que le théâtre doit comme par le passé prendre vigoureusement part à ce refus de I'uniformisation, en participant activement à la construction de pratiques critiques et libres. Nous espérons que Le Colombier nous permettra encore avec acteurs, auteurs et spectateurs de répondre directement à cette situation.

Gilles Sampieri